Chacun de nous est en mesure de constater des changements dans notre façon de nous alimenter selon que l’on soit confronté à un repas solitaire, entre amis ou en famille.
Les recherches suggèrent que les gens ont tendance à manger plus quand ils mangent avec d’autres personnes que quand ils mangent seuls, c’est ce qu’on appelle la facilitation sociale.
La facilitation sociale est un phénomène social selon lequel la présence d’autrui, en situation d’audience ou de co-action, a un effet bénéfique sur les performances d’un individu.
Cependant, on sait peu de choses sur quand et pourquoi ce phénomène se produit.
Dans une étude publiée le 21 août 2019 dans la revue The American Journal of Clinical Nutrition, les résultats suggèrent que manger avec les autres augmente la consommation de nourriture par rapport à manger seul, et ceci est modéré par la familiarité des « co-mangeurs ».
Les auteurs ont identifié les mécanismes potentiels de facilitation sociale de l’alimentation et soulignent la nécessité de poursuivre les recherches pour établir les facteurs de médiation.
Par ailleurs, ils proposent un nouveau cadre théorique dans lequel la facilitation sociale de l’alimentation a évolué en tant qu’adaptation évolutive efficace.

Manger ensemble fait partie d’une adaptation évolutive efficace
Selon cette étude, les gens mangent plus avec leurs amis et leur famille que lorsqu’ils dînaient seuls, ce qui serait un retour possible à l’approche de la survie de nos premiers ancêtres — un phénomène connu sous le nom de « facilitation sociale ».
Des études antérieures ont montré que ceux qui mangeaient avec d’autres mangeaient jusqu’à 48% plus de nourriture que des personnes seules. Aussi, les femmes souffrant d’obésité mangeaient socialement jusqu’à 29% de plus que lorsqu’elles mangeaient seules.
Manger « socialement » a un effet puissant sur l’augmentation de l’apport alimentaire par rapport au dîner solitaire.
Pour obtenir ces conclusions, des chercheurs britanniques et australiens ont évalué 42 études sur la recherche en matière de restauration sociale.
Ils expliquent que les anciens chasseurs-cueilleurs partageaient les aliments parce qu’ils les protégeaient contre les périodes d’insécurité alimentaire.
D’ailleurs, ce mécanisme de survie pourrait encore perdurer aujourd’hui, conduisant les gens à manger plus avec leurs amis et leur famille pour plusieurs raisons.
D’après eux, manger avec les autres est plus agréable et une meilleure récompense de la consommation sociale pourrait augmenter la consommation.

De plus, les normes sociales peuvent « permettre » de trop manger en compagnie mais les sanctionner quand on mange seul.
En outre, fournir de la nourriture devient alors associé aux éloges et à la reconnaissance de la part de la famille et des amis, renforçant ainsi les liens sociaux.
Nous avons trouvé des preuves solides que les gens mangent plus de nourriture lorsqu’ils dînent avec des amis ou la famille que lorsqu’ils sont seuls.
Cependant, cet effet de facilitation sociale sur l’alimentation n’a pas été observé à travers des études qui avaient examiné la consommation de nourriture chez des personnes qui ne se connaissent pas ou peu.
Ainsi, les données permettent de constater que les gens veulent transmettre des impressions positives à des étrangers.
« La sélection de petites portions peut constituer un moyen de le faire. C’est peut-être pour cette raison que la facilitation sociale de l’alimentation est moins marquée parmi les groupes d’étrangers », ajoutent les auteurs.

Renforcement des liens sociaux et mimétisme
Les résultats de recherches antérieures suggèrent que nous choisissons souvent ce que nous mangeons, ainsi que la quantité, en fonction du type d’impression que nous voulons donner sur nous-mêmes.
Les preuves suggèrent que cela peut être particulièrement prononcé pour les femmes qui mangent avec des hommes qu’elles souhaitent impressionner et pour les personnes obèses qui souhaitent éviter d’être jugées pour avoir trop mangé.
Aussi, l’étude souligne que, comme pour beaucoup d’autres espèces, les humains ont tendance à partager une ressource alimentaire commune.
La plupart des humains ne sont plus des chasseurs-cueilleurs, mais des mécanismes similaires à ceux qui servaient autrefois à une recherche efficace de nourriture continuent de guider notre comportement alimentaire.
La transition récente et rapide vers un paysage alimentaire où la nourriture est abondante a créé des formes de déséquilibre évolutif, et les stratégies de recherche de nourriture héritées ne servent plus leur objectif précédent.

Les chercheurs ont noté que, dans le cas de la facilitation sociale, « nous avons hérité d’un mécanisme qui assurait autrefois une distribution équitable des produits alimentaires, mais exerce maintenant une puissante influence sur les apports alimentaires insalubres ».
Notons, que le même processus a été observé chez les poulets, les rats, les gerbilles et d’autres espèces, ce qui suggère qu’il a un objectif ultime.
Les individus se disputent les ressources et les recherches suggèrent que manger plus que d’autres est susceptible de conduire à l’ostracisme, ce qui, à son tour, réduit la sécurité alimentaire.
Cela crée une tension entre un « être vu » qui partage des aliments de façon altruiste et mange autant qu’il le faut.
La facilitation sociale de l’alimentation a évolué en tant que stratégie garantissant l’obtention d’un maximum de consommation personnelle d’aliments dans le contexte du partage des aliments.

Ce que les auteurs décrivent comme une facilitation sociale peut être considéré comme un sous-produit naturel du partage social de la nourriture.
Cette stratégie aurait joué un rôle essentiel dans nos environnements ancestraux, ce qui explique également pourquoi cela est plus susceptible de se produire dans des groupes avec des individus qui se connaissent.
En conclusion, les résultats suggèrent que manger avec des personnes familières a un effet puissant d’augmentation de l’apport alimentaire, par rapport à manger seul.
Toutefois, des travaux supplémentaires sont nécessaires pour évaluer les modérateurs et les médiateurs de cet effet et de la contribution de la consommation sociale à un bilan énergétique positif.
De telles recherches auront des implications importantes pour le développement de stratégies de gestion du poids.
© Blog Nutrition Santé – Jimmy Braun – Octobre 2019

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Sources externes
Helen K Ruddock, Jeffrey M Brunstrom, Lenny R Vartanian, Suzanne Higgs. A systematic review and meta-analysis of the social facilitation of eating. The American Journal of Clinical Nutrition, Août/Octobre 2019; 110 (4): 842 DOI: 10.1093/ajcn/nqz155, https://academic.oup.com/ajcn/article/110/4/842/5552759
Photos © Ethan Hu ; Lee Hnetinka ; bruce mars ; Adrienn