Les régimes et la santé humaine sont incroyablement complexes et difficiles à prévoir.
En réduisant la disponibilité des nutriments essentiels, le changement climatique compliquera encore les efforts visant à éliminer la dénutrition dans le monde.

La pollution dans le monde est inquiétante pour la santé. En 2018, les émissions de CO2 ont augmenté de 2,0% dans le monde, soit la hausse la plus forte depuis 2011.
Ce constat inquiétant qui mène au réchauffement climatique va obliger toutes les populations à adopter un régime du futur adapté aux contraintes.
L’augmentation des concentrations atmosphériques de dioxyde de carbone (CO2) affecte la nutrition globale en modifiant la productivité agricole et la teneur en éléments nutritifs des cultures vivrières.
Afin d’imaginer les conséquences de ce changement climatique sur l’alimentation, des chercheurs ont publié le 7 juillet 2019 dans la revue The Lancet Planetary Health une synthèse complète des impacts du changement climatique sur la disponibilité globale en nutriments.
Ils ont combiné ces effets à des projections économiques pour estimer les variations nettes de la disponibilité des éléments nutritifs entre 2010 et 2050.
Les auteurs révèlent que, au cours des 30 prochaines années, un changement climatique et une augmentation des émissions de CO2 pourraient réduire considérablement la disponibilité en nutriments essentiels.

La hausse des émissions de CO2 va réduire la disponibilité des éléments nutritifs dans le monde
L’un des plus grands défis à relever pour réduire la faim et la dénutrition dans le monde consiste à produire des aliments qui fournissent non seulement assez de calories, mais qui apportent également la quantité suffisante de nutriments nécessaires.
Selon de nouvelles recherches, le changement climatique et l’augmentation du dioxyde de carbone (CO2) au cours des 30 prochaines années pourraient réduire considérablement la disponibilité d’éléments nutritifs essentiels tels que les protéines, le fer et le zinc.
Les impacts totaux liés au changement climatique et des niveaux élevés de CO2 dans l’atmosphère réduiraient la croissance de la disponibilité globale de protéines (-19,5%), de fer (-14,4%) et de zinc (4,6%) par habitant.
Les auteurs constatent que beaucoup de progrès ont récemment été fait pour réduire la malnutrition dans le monde.
Néanmoins, la croissance démographique mondiale au cours des 30 prochaines années nécessitera une augmentation de la production d’aliments fournissant suffisamment de nutriments.
Ces résultats suggèrent que le changement climatique pourrait ralentir les progrès en matière d’amélioration de la nutrition mondiale en rendant simplement les nutriments essentiels moins disponibles qu’ils ne le seraient sans.

Agissons au plus vite contre le changement climatique
Cette approche de modélisation a été coécrite par un groupe international de chercheurs et représente la synthèse la plus complète des impacts de l’augmentation des émissions de CO2 et du changement climatique sur la disponibilité des éléments nutritifs dans l’approvisionnement alimentaire mondial à ce jour.
Les améliorations technologiques et les effets sur les marchés devraient augmenter la disponibilité des éléments nutritifs par rapport aux niveaux actuels d’ici 2050, mais ces gains sont considérablement réduits par les effets négatifs de la concentration croissante de dioxyde de carbone.
Tandis que des niveaux plus élevés de CO2 peuvent stimuler la photosynthèse et la croissance de certaines plantes, des recherches antérieures ont également montré que ces derniers réduisent la concentration en micronutriments essentiels dans les cultures.

L’étude révèle que le blé, le riz, le maïs, l’orge, les pommes de terre, le soja et les légumes subiraient tous des pertes en éléments nutritifs d’environ 3% en moyenne d’ici 2050 en raison de la concentration élevée de CO2.
Toutefois, les effets ne seront probablement pas ressentis de manière uniforme dans le monde entier.
De nombreux pays connaissant actuellement des niveaux élevés de carence en éléments nutritifs et devraient également être davantage affectés par la diminution de la disponibilité en éléments nutritifs à l’avenir.

Les réductions de nutriments devraient être particulièrement sévères en Asie du Sud, au Moyen-Orient, en Afrique au sud du Sahara, en Afrique du Nord et en Russie.
« En général, les habitants des pays à revenu faible ou intermédiaire reçoivent une plus grande partie de leurs nutriments provenant de sources végétales, dont la biodisponibilité a tendance à être inférieure à celles d’origine animale », expliquent les auteurs.

Une projection qui est très inquiétante
Cela signifie que de nombreuses personnes dont l’apport en nutriments est déjà relativement faible seront probablement plus vulnérables aux carences en fer, en zinc et en protéines à mesure que les cultures perdent leurs éléments nutritifs.
Nombre de ces régions sont également celles qui devraient générer la plus forte croissance démographique et nécessitant par conséquent la plus forte augmentation de la disponibilité des éléments nutritifs.
L’impact sur les cultures individuelles peut également avoir des effets disproportionnés sur les régimes alimentaires et la santé.
Par exemple, les pertes importantes en nutriments dans le blé ont des implications particulièrement étendues. Le blé représente une part importante des régimes alimentaires dans de nombreuses régions du monde.
Toute modification de ses concentrations en éléments nutritifs peut donc avoir un impact considérable sur les micronutriments reçus par de nombreuses personnes.
Aussi, la disponibilité de protéines, de fer et de zinc dans le blé devrait être réduite de 12% d’ici 2050 dans toutes les régions.

C’est probablement dans les régions où la consommation de blé est particulièrement élevée, notamment en Russie, au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Europe de l’Est où les disponibilités de protéines provenant du blé diminuent le plus.
En Asie du Sud, où l’apport en fer de la population se situe déjà bien en dessous du niveau recommandé, comme l’Inde qui affiche la prévalence la plus élevée d’anémie au monde, la disponibilité en fer restera probablement insuffisante.
De plus, les niveaux élevés de carbone poussent la disponibilité moyenne de zinc dans la région en dessous du seuil de l’apport nutritionnel recommandé.
Enfin, les chercheurs ont également souligné la nécessité de poursuivre les travaux en s’appuyant sur leurs conclusions. Notamment en ce qui concerne les impacts climatiques sur les sources animales, la composition nutritionnelle des cultures, les carences en éléments nutritifs résultant des chocs climatiques à court terme et les technologies.
Quantifier les impacts potentiels sur la santé des individus nécessite également de prendre en compte les nombreux facteurs autres que la consommation alimentaire (accès à l’eau potable, assainissement, éducation) qui influent sur les résultats en matière de nutrition et de santé.
© Blog Nutrition Santé – Jimmy Braun – Juillet 2019

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Sources externes
Robert H Beach, Timothy B Sulser, Allison Crimmins, Nicola Cenacchi, Jefferson Cole, Naomi K Fukagawa, Daniel Mason-D’Croz, Samuel Myers, Marcus C Sarofim, Matthew Smith, Lewis H Ziska. Combining the effects of increased atmospheric carbon dioxide on protein, iron, and zinc availability and projected climate change on global diets: a modelling study. The Lancet Planetary Health, 2019; 3 (7): e307 DOI: 10.1016/S2542-5196(19)30094-4, https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2542519619300944
Photos © Holger Link ; Dustan Woodhouse ; Anh Vy ; Johannes Plenio