La méditation et les exercices mentaux modifient la plasticité cérébrale et réduisent le stress

La méditation et les exercices mentaux modifient la plasticité cérébrale et réduisent le stress

La méditation est bénéfique pour notre bien-être et notre santé. Étudiée de plus près par les scientifiques, la pratique méditative révèle de nombreux atouts pour tous les humains, sans aucune barrière sociale.

Dernièrement, des études précisaient que méditer inverse les réactions de l’ADN en cause dans le stress, et qu’une pratique de la méditation de 25 minutes au quotidien améliore notre santé cérébrale et notre énergie

Les étonnantes vertus de la méditation


La méditation a d’ailleurs fait l’objet d’un beau documentaire diffusé sur ARTE le 23 septembre 2017.

Comment la méditation impacte-t-elle notre cerveau et l’ensemble de notre organisme ? Cette pratique aurait-elle-même des vertus thérapeutiques ? Découvrez l’émergence de nouvelles voies médicales, à la croisée entre des traditions orientales et des savoirs occidentaux dans ce documentaire diffusé le 23 septembre sur ARTE et disponible sur arte.tv/science.

Sagesse ancienne et thérapie du future


Cette sagesse ancienne a été soutenue par des études scientifiques axées sur la pratique de la conscience. Cependant, la pratique de la méditation désigne une variété de techniques de formation mentale qui visent à cultiver diverses compétences.

En d’autres termes, en dépit de l’intérêt croissant pour la recherche sur la méditation, la situation n’est pas très claire sur quel type de pratique mentale est particulièrement utile pour améliorer l’humeur, l’attention et la conscience ou les compétences sociales, comme la compassion et la prise de perspective.

D’autres questions ouvertes pour savoir si de telles pratiques peuvent induire une plasticité structurelle du cerveau et modifier les réseaux du cerveaux, ou quelles sont les méthodes de formation les plus efficaces pour réduire le stress social.

Pour répondre à ces questions, des chercheurs du Département de Neurosciences Sociales, de Sciences cognitives et Cérébrales Humaines de l’Institut Max Planck à Leipzig (Allemagne), ont mené un projet à grande échelle : ReSource Project. Il vise à distinguer les effets uniques des différentes méthodes de formation mentale sur le cerveau , le corps et le comportement social. Les résultats actuels de ce grand projet ont été publié dans la revue Science Advances le 04 octobre 2017.

Sagesse ancienne et thérapie du future

Bien que la recherche neuroscientifique ait révélé des changements cérébraux dépendants de l’expérience tout au long de la vie dans les domaines sensoriel, moteur et cognitif, la plasticité relative aux capacités sociales reste largement inconnue.

Pour étudier si la formation mentale ciblée de différentes compétences cognitives et sociales peut induire des changements spécifiques dans la morphologie cérébrale, des chercheurs ont recueilli des données longitudinales d’imagerie par résonance magnétique (IRM) au cours d’une intervention de formation mentale de 9 mois à partir d’un grand échantillon d’adultes âgés entre 20 et 55 ans.

Au moyen de divers exercices mentaux quotidiens et de séances groupées hebdomadaires, les protocoles de formation traitent spécifiquement de trois domaines fonctionnels: 1, l’attention portée à l’attention et l’interception, 2. les compétences socio-affectives (compassion, traitement des émotions difficiles et motivation prosocial) , 3. les compétences socio-cognitives (perspective cognitive, prise sur soi et les autres et métacognition).

Le cerveau humain

Les analyses d’épaisseur corticale basées sur l’IRM, contrastant les différents modules de formation les unes avec les autres, ont indiqué des changements divergents spatialement dans la morphologie corticale. Les changements de cerveau structurel spécifiques au module ont été en corrélation avec les améliorations comportementales induites par la formation chez les mêmes individus dans les domaines spécifiques de l’attention, de la compassion et de la prise de conscience cognitive, respectivement, et se chevauchant avec des réseaux fonctionnels. Les résultats longitudinaux indiquent une plasticité structurale dans des réseaux cérébrales socio-affectifs et socio-cognitifs bien connus chez des adultes en bonne santé basés sur des pratiques mentales quotidiennes ciblées.

Ces résultats pourraient favoriser le développement d’interventions de formation mentale fondées sur des données probantes dans des contextes cliniques, éducatifs et corporatifs visant à cultiver l’intelligence sociale, la motivation prosociale et la coopération.

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ReSource Project ou l’ambition de révéler une vérité sur les pratiques méditatives dans le monde


Le projet ReSource comprenait trois modules de formation de trois mois, chacun axé sur une compétence différente :

  1. Le premier module était axé sur la pleine conscience, afin de travailler l’attention et l’interception. Les participants ont reçu des instructions sur les techniques de méditation classiques semblables à celles enseignées dans le programme de réduction du stress de 8 semaines (MBSR, Mindfulness-Based Stress Reduction), qui nécessite de focaliser l’attention sur la respiration (méditation respiratoire), sur les sensations dans différentes parties du corps (méditation par balayage corporel), ou sur des signaux visuels ou auditifs dans l’environnement. Les deux exercices ont été pratiqués dans la solitude.

  2. Le deuxième module a été axé sur les compétences socio-affectives, comme la compassion, la reconnaissance et le traitement des émotions difficiles. En plus des exercices de méditation classiques, les participants ont appris une nouvelle technique leur permettant de pratiquer chaque jour pendant 10 minutes en duo. Ces exercices de partenaires (« contemplative dyads ») se caractérisaient par un échange ciblé d’expériences affectives de vie quotidienne visant à former la gratitude, à faire face aux émotions difficiles et à l’écoute empathique.

  3. Dans le troisième module, les participants ont formé des capacités socio-cognitives, telles que la métacognition et la prise de perspective sur des aspects d’eux-mêmes et sur l’esprit des autres. Outre les exercices de méditation classiques, ce module a également offert des pratiques dyadiques (qui lient deux choses) axées sur l’amélioration des capacités de prise de décision. Par paires, les participants ont appris à prendre mentalement la perspective d’une « partie interne » ou de leur personnalité. Des exemples de parties intérieures étaient la « mère inquiète », « l’enfant curieux » ou le « juge interne ».

Matthieu RICARD : moine bouddhiste et Neurobiologiste
Matthieu Ricard, docteur en génétique cellulaire, moine bouddhiste tibétain, auteur et photographe, participant à l’étude ReSource Project.

Tous les exercices ont été pratiqués six jours par semaine pour un total de 30 minutes par jour. Les chercheurs ont évalué une variété de mesures telles que les tests de comportement psychologique, les mesures du cerveau au moyen de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et des marqueurs de stress tels que la libération de cortisol avant et après chacun des trois modules de formation pendant les trois mois.

Selon la technique de formation mentale pratiquée sur une période de trois mois, les structures cérébrales spécifiques et les marqueurs comportementaux connexes ont considérablement changé chez les participants. Par exemple, après la formation du premier module (MBSR, pleine conscience), les chercheurs ont observé des changements dans le cortex dans des domaines précédemment considérés comme liés à l’attention et au fonctionnement exécutif.

Méditer réduit la perception subjective du stress

Simultanément, l’attention a augmenté ainsi que les aspects exécutifs de l’attention, alors que la performance dans les mesures de compassion ou de prise de vues n’avait pas augmenté de manière significative. Les capacités sociales n’ont été touchées que par les deux autres modules intersubjectifs.

Dans les deux autres modules, axés soit sur les compétences socio-affectives ou socio-cognitives, les chercheurs ont pu montrer des améliorations comportementales sélectives en matière de compassion et de prise de perspective. Ces changements de comportement correspondaient au degré de plasticité cérébrale structurelles spécifique de régions situées dans le cortex qui soutiennent ces capacités.

Même si la plasticité du cerveau en général a longtemps été étudiée en neurosciences, jusqu’à maintenant on connaissait peu la plasticité du cerveau social. « Les neurosciences sociales se proposent d’explorer les fondements neurologiques des comportements sociaux comme l’attachement, l’empathie ou la coopération. Elles le font dans une vision intégrative où mécanismes neuronaux et facteurs sociaux s’influencent réciproquement. »

Bientôt, méditer sera aussi naturel que de se brosser les dents

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Ces résultats fournissent des preuves impressionnantes de la plasticité cérébrale chez les adultes grâce à une pratique mentale quotidienne brève et concentrée, entraînant une augmentation de l’empathie, de la compassion et de la prise de perspective, qui sont des compétences cruciales pour les interactions sociales réussies, la résolution des conflits et la coopération. Ces résultats sont très pertinents pour les systèmes éducatifs et pour une application clinique.

En plus d’affecter différemment la plasticité du cerveau, les différents types de formation mentale ont également affecté de manière différentielle la réponse au stress. Les chercheurs ont découvert que, dans les participants soumis à un test de stress psychosocial, la sécrétion de l’hormone du stress (cortisol) a diminué jusqu’à 51%. Cependant, cette réduction de la sensibilité au stress dépendait des types de formation mentale préalablement formés.

Seuls les deux modules (n°2 et 3) axés sur les compétences sociales ont considérablement réduit la libération de cortisol après un facteur de stress social. Les chercheurs supposent que la réponse au stress du cortisol a été affectée en particulier par les exercices diyadiques pratiqués dans les modules sociaux.

La divulgation quotidienne des informations personnelles à un étranger couplé à l’expérience d’écoute empathique dans les dyades, sans jugement, peut avoir des participants « immunisés » contre la peur de la honte sociale et du jugement par d’autres personnes — des phénomènes généralement déclencheurs du stress social. D’autre part, la formation du module pleine conscience (n°1) n’a pas eu d’effet amorti sur la libération de cortisol après avoir connu un facteur de stress social.

Méditer affecte la plasticité du cerveau

Quel que soit le type de méditation, la pratique régulière réduit la perception subjective du stress


Fait intéressant, malgré ces différences au niveau de la physiologie du stress, chacun des modules de formation a réduit la perception subjective du stress. Cela signifie que, bien que des changements physiologiques objectifs dans la réactivité sociale du stress aient été observés uniquement lorsque les participants se sont engagés avec d’autres personnes, ils ont formé leurs capacités intersubjectives et se sont senti subjectivement moins stressés après tous les modules de formation mentale.

Enfin, les résultats actuels mettent en évidence non seulement que les compétences sociales cruciales nécessaires à une interaction et une coopération sociales réussies peuvent encore être améliorées chez les adultes en bonne santé. Une telle formation mentale entraîne des changements structurels du cerveau et la réduction du stress social, mais aussi les différentes méthodes de formation mentale ont les effets différentiels sur le cerveau, sur la santé et le comportement.

« C’est important que vous vous entraîniez ! Une fois que nous avons compris quelles techniques de formation mentale ont quels effets, nous pourrons utiliser ces techniques de manière ciblée pour soutenir la santé mentale et physique » indiquent les chercheurs. Par exemple, de nombreux programmes de prise de conscience actuellement populaires peuvent être une méthode valable pour attirer l’attention et renforcer l’efficacité cognitive.

Cependant, si nous, en tant que société, voulons devenir moins vulnérables au stress social ou former des compétences sociales, comme l’empathie, la compassion et la prise de perspective, les techniques de formation mentale se concentrant davantage sur le « nous » et la connectivité sociale chez les personnes peuvent être de meilleurs choix.


Pour compléter cet article, je vous propose de lire le nouvel ouvrage de Matthieu Ricard et Wolf Singer : Cerveau & Méditation.

Cerveau & Méditation

Moine bouddhiste depuis quarante ans, Matthieu Ricard est l’un des méditants les plus chevronnés, régulièrement sollicité par les universités du monde entier pour se prêter à des expériences sur le cerveau.

Neurobiologiste, directeur émérite du Max Planck Institute for Brain Research, Wolf Singer est l’un des plus grands spécialistes mondiaux du cerveau.

Pendant huit ans, ils ont partagé leurs savoirs et se sont interrogés ensemble sur le fonctionnement de l’esprit. La méditation modifie-t-elle les circuits neuronaux ? Comment se forment les émotions ? Quels sont les différents états modifiés de la conscience ? Qu’est-ce que le « moi » ? Le libre arbitre existe-t-il ? Que peut-on dire de la nature de la conscience ?… Chaque fois, Matthieu Ricard et Wolf Singer confrontent deux traditions de pensée. L’une, la philosophie bouddhiste, est une connaissance à la première personne, résultat des pratiques millénaires des moines tibétains. L’autre, les neurosciences, est une connaissance à la troisième personne, issue d’expérimentations en laboratoire. Les deux approches sont radicalement différentes, mais elles aboutissent souvent aux mêmes conclusions.

Pour développer une véritable « science de l’esprit » leur rapprochement, esquissé depuis quelques années, est indispensable. C’est ce que propose cet ouvrage : un dialogue approfondi entre les sciences contemplatives et les sciences modernes, pour percer les mystères de l’esprit humain.

© Blog Nutrition Santé – Jimmy Braun – Octobre 2017


Sources externes